5 questions à l’artiste Damien Deroubaix, qui, pour l’exposition Fisimatenten dans le cadre de Régionale à La Chaufferie, a réuni 7 étudiants de l’école des Beaux-Arts de Sarrebrück (Allemagne).
Photographie, peinture, gravure ou dessin, Damien Deroubaix a profité de sa carte blanche pour mettre en avant la pluridisciplinarité de la HBKSaar.

Vous avez carte blanche pour une exposition avec des étudiants de la HBKSaar, comment avez-vous envisagé cette collaboration ?
J’ai sélectionné des oeuvres d’étudiants sur le point de quitter l’école, je voulais un ensemble qui soit représentatif de ce qui se produit dans cet établissement. J’ai déjà organisé plusieurs expositions, mais n’étant pas un commissaire d’exposition, j’ai procédé à ma façon : comme dans mon travail, j’ai fait des rapprochements, des collages, des montages avec des dessins, de la peinture, de la gravure, des objets en verre ou de la photographie. J’ai découvert des travaux intéressants, ils ne sont pas tous encore au point, mais j’ai trouvé de la maturité chez certains.

Vous avez vécu plusieurs années à Berlin et fait une résidence à New York. Selon vous, quelle importance revêtent, pour les jeunes artistes, les échanges à l’étranger ?
C’est essentiel ! Voyager nous rend plus intelligent, on se nourrit de la culture des autres. Lorsque j’étais étudiant, j’ai fait un échange Erasmus à Karlsruhe à une époque où la France était allergique à la peinture. J’ai découvert en Allemagne des personnes qui pensaient autrement, qui avaient une autre façon d’aborder l’art. Cet échange a fait avancer mon travail et ma réflexion sur l’art.

Vos oeuvres sont influencées par l’art germanique, participer à Régionale et proposer une exposition dans cette région trirhénane fait sens pour vous ?
C’est très motivant de participer à ce genre d’initiative. Ayant moi-même exposé dans cette région, j’encourage vivement les étudiants français, allemands et suisses à traverser la frontière et découvrir d’autres pratiques artistiques.

Vous êtes installé dans un petit village en Moselle, à Meisenthal, après avoir vécu à Berlin et New York. En quoi cela influe sur votre pratique artistique ?
J’ai remarqué que chaque endroit où j’ai vécu a beaucoup influencé mon travail. À Berlin, la notion d’espace, véritable expression du pouvoir comme en témoigne la Karl Marx Allee, s’est retrouvée dans mes oeuvres. À Paris, ce sont les images publicitaires que je voyais dans le métro qui m’inspiraient. À Meisenthal, je me retrouve au calme dans l’atelier que j’ai construit, selon mes formats.

Vous êtes membre du conseil artistique et scientifique de la HEAR, qu’est-ce que cela vous apporte, en tant qu’artiste, d’être investi dans une école d’art et plus globalement d’interagir avec de jeunes artistes ?
C’est une relation à double sens : cela fait plusieurs années que j’ai des assistants qui viennent de la HEAR, ils me renvoient un regard neuf, des interrogations sur mon travail auxquelles je n’avais pas pensé, des interrogations de leur génération. Cela permet d’avoir du recul sur son propre travail. De mon côté, je propose à mes assistants d’être présents lorsque je reçois des visites de directeur de musée, de curateur ou de journaliste, ça leur permet d’appréhender de préparer « l’après-école ». D’autre part, intervenir dans une école d’art me permet de transmettre mes connaissances. C’est parfois très intense, j’ai croisé des jeunes artistes qui avaient une soif de comprendre comment fonctionne un artiste, une soif d’en apprendre plus techniquement.

(mis en ligne le 14.05.2017)


Fisimatenten, du 3 décembre 2016 au 8 janvier 2017 à La Chaufferie, galerie de la HEAR, Strasbourg. Avec : Mathias Aan’t Heck, Frank Jung, Tim Jungmann, Helena Krohn, Lila Rose, Lena Schwingel, Irina Schulze, Luise Talbot.
Interview Emmanuel Dosda – Image© Damien Deroubaix