Mulhouse, HEAR, amphithéâtre de 10h30 à 18h
Cette journée d’étude se propose de se pencher sur l’héritage complexe du wax entre l’Afrique et l’Europe, dans le cadre d’une culture de la mode mondialisée, mais aussi de montrer son actualité et de questionner de façon plus large les enjeux du design textile sur le continent africain.
3 quai des Pêcheurs
68200 Mulhouse
Entrée libre
10h30 — Emmanuel Amougou
HDR, Enseignant-chercheur Ensa Paris La Villette
13h30 — Anne Grosfilley
Docteure, Anthropologie et Ethnologie, spécialiste Wax
16h — Jean Paul Pragout
Expert en wax, expert entreprise DMC
18h — Fin de la journée
Le wax est le symbole même des tissus africains, il évoque la culture et la mode africaines. Pourtant il est un produit d’exportation des Pays-Bas, inventé au travers de la l’industrialisation de techniques artisanales, développé par des entrepreneurs néerlandais qui se sont approprié les techniques du batik à Java pour les produire à grande échelle. A la fin du 19e siècle, cette production textile industrielle, de masse mais de haute qualité arrive sur le continent africain.
C’est un textile qui va à partir de là se généraliser, et qui va surtout être l’objet d’une réappropriation permanente entre le continent africain et l’Europe. Plus que cela : le wax est désormais copié et recopié – ce qui contribue d’une certaine manière à le rendre toujours plus incontournable. Au point de peut-être faire passer au second plan les textiles spécifiquement africains, tels que les bogolans maliens, ou encore le rabal sénégalais, ou – plus connus les tissus kenté ashantis.
En même temps le wax est réinterprété et investi par de nombreux créateurs africains contemporains, tels que le camerounais Serge Mouangue qui fait dialoguer la culture japonaise du kimono et le wax, Yinka Shonibare qui interroge la construction identitaire de l’individu à l’époque postcoloniale au travers du vêtement et du costume, en utilisant le batik[1] ou encore les créateurs Loza Maleombhoou et Elie Kuamé, qui ont collaboré avec l’entreprise Vlisco à l’occasion du 170e anniversaire de l’entreprise néerlandaise[2]. Le wax a donc une place à part dans la culture africaine et mondiale, qu’il convient d’interroger, dans ses relations avec l’Europe notamment.
De nombreuses expositions ont rendu compte ces dernières années des échanges vivaces, quelquefois complexes et conflictuels entre les continents à propos des textiles africains et la mode [3], et notamment à propos du wax. Il convient d’interroger les codes, les signes que véhiculent le wax pour en dégager des éléments d’une sémiologie qui tend à se redéfinir en permanence, et de questionner les contextes et glissements de sens opérés au fil des réappropriations culturelles[4]. Car ce qui est intéressant dans les cultures du wax, c’est justement l’invention d’une «tradition inventée»[5].
1. A ce propos l’article de Valérie Morsisson, «Yinka Shonibare, MBE and Sartorial Parody : Costume as Subversive Practice», in Etudes britanniques contemporaines, 51/216(lien http : //doi.org/10.4000/ebc.3401)
2. Article de Prisca Munkeni Monnier pour le Monde du 30 décembre 2016.
3. Citons pour exemple l’exposition, en 2015 de «Fashion mix» à Paris, au Musée national de l’immigration et au Palais Galliera, et plus récemment «African Fashion Now ! A strory of taste, globalization and style» Fowler Museum at UCLA, ou tout récemment, à l’été 2019 à Berlin «Connecting Afro Futures» au Kunstgewerbemuseum.
4. Anne Grosfilley, Wax & Co; Anthologie..Paris, La Martinière, 2017, p. 17 et suiv.
5. Eric Hobsbawm, Terence O. Ranger, The Invention of Tradition, Cambridge, Cambridge University Press, 1992, cité par Anne Grosfilley in «Récit de vie, tissu d’ailleurs. Les enjeux du wax et des populations noires en France», revue Hommes & migrations, 1310/2015 pp.36.