Un répit, une respiration. Dans la ville qui s’affaire, près de l’école qui fourmille, l’association Saxifrage-les-jardins propose de faire éclore un cocon verdoyant. On se pose un instant pour évoquer cette initiative régénérante.

Les Saxifrages sont des plantes un peu sauvages, qui poussent facilement et un peu partout. C’est ce végétal rustique qui a été choisi par des étudiant·es de la HEAR à Mulhouse pour désigner leur association toute neuve. Projet en discussion dès le premier confinement de 2020, il s’est concrétisé début 2022 par l’aboutissement des procédures administratives (validation de la convention de partenariat tripartite entre l’association, la Ville de Mulhouse et la HEAR par le Conseil d’administration de l’école). « L’idée primordiale est de construire quelque chose de collectif : l’association est ouverte à tou·tes, même aux personnes extérieures à l’école, car c’est dans le partage et la transmission qu’on veut la faire évoluer. », explique Martin, étudiant en 3e année Art. Alors on s’organise, on échange et on jardine ensemble !

Les samedi 30 avril et dimanche 1er mai 2022, les étudiant·es ont entrepris la fabrication de bacs hors-sol en briques. Ce premier atelier participatif s’est déroulé dans une ambiance conviviale. Les volontaires se sont retrouvé·es le samedi matin pour définir les emplacements et élaborer la stratégie de construction des bacs tou·tes ensemble, avant de poursuivre les travaux le reste du week-end. « Des ami·es sont venu·es nous soutenir aussi ; et puis des gens passaient, regardaient, certains s’arrêtaient pour discuter, c’était sympa. Un monsieur m’a même donné un pied de thym en me disant qu’il était un peu rabougri chez lui et qu’il préférait qu’il pousse ici. Il est planté ! », témoigne Martin. Ce premier test réussi, les étudiant·es réfléchissent déjà aux prochains temps forts qui pourraient être programmés régulièrement pour garantir le bon entretien de l’espace et la connivence au sein de l’association.

« On voudrait que la démarche devienne pérenne en impliquant des étudiant·es de toutes les années et sections de la HEAR, mais aussi des personnes extérieures. Comme ça le jardin perdurera même quand les créateur·trices de l’association auront terminé leurs études. », développe Mélodie, également étudiante en 3e année Art. Avis aux intéressé·es : les prochains travaux prévus comprendront l’installation d’un cabanon pour les outils de jardinage, la mise en place d’un composteur public et d’un récupérateur d’eau, et l’établissement d’un système d’irrigation performant et économe.

Du thym, des radis, des capucines… et du lien !

« Le jardin comme l’association se dessinent petit à petit, de projet en projet. C’est en faisant que l’on apprend, c’est pour cela qu’on ne met pas de frontières. », ajoute Mélodie. Le jardin se destine à être à la fois ornemental, aromatique et nourricier. Et les objectifs sont multiples : lieu d’expérimentation et d’observation du vivant, initiative concrète témoin d’un mouvement générationnel touché par les questions environnementales, ce jardin exprime une volonté de retisser des liens avec le vivant et de le réintégrer dans la ville. Lien avec le vivant… humains compris bien sûr ! Faire venir un·e conférencier·e pour expliquer les principes du compostage, se rapprocher d’une autre association locale pour préparer des repas collectifs à partir des produits récoltés au jardin, y orchestrer des performances musicales ouvertes au public, les orientations sont nombreuses et variées pour animer cet endroit.

Le partage de moments de vie et de création vient de plus enrichir l’expérience relationnelle et compléter la réflexion et pratique artistique des étudiant·es impliqué·es. Pour preuve, une autre utilisation envisagée pour le jardin serait d’en faire un lieu d’exposition au milieu du vivant afin d’offrir une alternative rafraîchissante aux salles et galeries habituelles.

En outre, au fil des saisons et selon les vents, Saxifrage compte essaimer. Le projet de permaculture dans le jardin de la HEAR persistera afin de rendre le lieu le plus vivant possible, mais l’association est foncièrement mulhousienne et ambitionne de s’implanter ailleurs dans la ville. « On n’exclut pas d’essayer de créer d’autres petits jardins partout dans Mulhouse à l’avenir. On a déjà commencé à y réfléchir, mais on y va très progressivement parce que tout cela prend du temps : pour l’instant on se concentre sur le jardin de l’école. », conclut Mélodie.

En attendant (impatiemment) la suite des événements, pourquoi ne pas méditer sur cette pensée du peintre allemand Albrecht Dürer : « En vérité, l’art est enfermé dans la nature ; celui qui peut l’en extraire, celui-là est un maître. » ?


L’association a émergé en parallèle de la mise en place du parcours Nomade dont elle partage la philosophie et les thématiques de réflexion.
Parcours Nomade
Rentrée féconde pour Nomade


Anaïs Jean • Publié le 11 mai 2022
Crédits photographiques • Association Saxifrage-les-jardins